Le gouvernement Henry se dote d’un budget rectificatif reconduit, optimiste et plein d’engagements

Written by on April 12, 2022

Publié le 2022-04-12 | lenouvelliste.com La lettre de cadrage du budget rectificatif reconduit 2021-2022 du gouvernement Henry table sur 0.3 % de croissance du Pib, 6,4 % de pression fiscale, 27,3 % d’inflation, 40.3 milliards de gourdes de financement de la BRH contre 49,2 % de l’exercice précédent. Avec un programme signé avec le FMI, le gouvernement Henry planifie l’élimination progressive de la subvention des produits pétroliers, la lutte contre la contrebande, des reformes au niveau des institutions fiscales et prévoit 3 milliards pour un programme social qui  financera des campagnes agricoles pour mitiger la hausse anticipée de l’inflation. 

Le Premier ministre Ariel Henry, « dans un mémorandum à tous les ordonnateurs des institutions de l’administration d’Etat », a présenté  « la lettre de cadrage qui fixe les grandes orientations macroéconomiques et définit les grandes lignes de la politique budgétaire pour le reste de l’exercice fiscal 2021-2022 », le lundi 4 avril 2022. « Les chocs ont aussi fortement impacté le fonctionnement des services de l’Administration publique, et perturbé le calendrier budgétaire. Le pays n’a pas pu se doter d’un budget à temps pour l’exercice fiscal 2021-2022. Ainsi, la gestion des six premiers mois de l’exercice fiscal en cours se fait à travers un budget rectificatif reconduit », a indiqué la lettre de cadrage du budget.

« Malgré les contraintes imposées par l’environnement socio-politique et économique, le gouvernement entend restaurer la stabilité macroéconomique et la croissance, et renforcer les cadres de politiques économiques avec un ensemble de mesures réalistes, pour la plupart courageuses. C’est dans cette optique que je vous soumets, au nom du Gouvernement, la présente lettre de cadrage qui fixe les grandes orientations macroéconomiques et définit les grandes lignes de la politique budgétaire pour le reste de l’exercice fiscal 2021-2022 », peut-on lire dans cette lettre..

Le gouvernement Henry optimiste

Le gouvernement, assez optimiste, prévoit que « l’activité économique devrait rebondir modérément au cours de l’exercice fiscal 2021-2022 avec une croissance du PIB réel d’environ 0.3%, soutenue par une reprise de l’investissement, à travers la mise en œuvre du PRIPS et le financement du secteur agricole dans un contexte d’une relative stabilité politique ». Cette lettre de cadrage situe le retour de la croissance du PIB avec la remise en place des institutions démocratiques, entre le 1er octobre 2022 et 1er octobre 2023. «  Aussi, faudra-t-il attendre l’exercice fiscal 2022-2023 pour mettre en place les institutions démocratiques et renouer avec la croissance », prévoit-elle.

Des prévisions macroéconomiques et grands chantiers

Pour cet exercice, 2021-2022, la lettre de cadrage soutient aussi  « en tenant compte des orientations et des contraintes », que le gouvernement table sur un taux de pression fiscale de  « 6.4%, contre 5.7% au cours de l’exercice fiscal précédent » ; « un taux d’inflation révisé à 27.3% en glissement annuel contre 13% en 2020- 2021 et un financement de la BRH 40.3 milliards de gourdes contre 49.2 milliards en 2020-2021 ».

Le gouvernement Henry, dans « un contexte d’urgences économiques et financières », de « déséquilibres macroéconomiques et financiers » à contenir, a évoqué dans cette lettre de cadrage, des grands chantiers de reformes à attaquer pour renouer avec la croissance et l’urgence, de dégager les « voies et moyens » pour : améliorer la gouvernance (juridique et politique), de garantir un climat politique et sécuritaire sereins pour faciliter la tenue d’une consultation populaire en vue de l’adoption des modifications à introduire dans la constitution et l’organisation des prochaines élections en vue du renouvellement du personnel politique.

3 milliards de gourdes pour un programme de protection sociale

La lettre de cadrage a évoqué les 10 milliards de gourdes sur quatre ans pour financer le Plan de Relèvement Intégré de la Péninsule du Sud (PRIPS) annoncé lors de la conférence des bailleurs, et surtout annoncé que pour « renforcer la mise en œuvre de la Politique Nationale de Protection et de Promotion Sociales (PNPPS) en lui affectant une enveloppe budgétaire de 3 milliards de gourdes pour les six mois restants de l’exercice fiscal, en attendant l’adoption de son Plan d’actions ».

Avec ces 3 milliards de gourdes, le gouvernement prévoit « d’intervenir dans le financement des campagnes agricoles pour mitiger la hausse anticipée de l’inflation, notamment à cause des impacts de la crise géopolitique en Europe de l’Est ».

Le gouvernement a négocié un programme avec le FMI

« Nous venons de négocier un programme de référence avec le Fonds monétaire international (FMI) dans lequel nous nous sommes engagés à mettre tout en branle pour renouer avec la croissance et limiter les impacts de la hausse anticipée de l’inflation sur les ménages les plus vulnérables, à travers la mise en œuvre des programmes sociaux du gouvernement », a annoncé le Premier ministre Ariel Henry dans cette lettre de cadrage.

« L’accompagnement du FMI, à travers la signature de ce programme, jouera un rôle catalyseur en signalant aux autres Partenaires Techniques et Financiers notre volonté de progresser dans la mise en œuvre de politiques et de réformes nécessaires pour restaurer la stabilité macroéconomique et retourner sur les sentiers de la croissance », selon la lettre de cadrage du Premier ministre Ariel Henry qui  a égrené les autres reformes que le gouvernement se propose de conduire ou, pour certains, les conditionnalités de ce programme signé avec le FMI.

Plan d’élimination progressive de la subvention des produits pétroliers

En plus des autres mesures et réformes en cours, le gouvernement entend avancer dans le sens « de la Gestion des équilibres macroéconomiques et financiers » à travers : la réduction du financement de la BRH par rapport à son niveau de l’exercice fiscal précédent en vue de contenir l’inflation ; le renforcement des mesures de gestion de la politique de change. Sur le front du renforcement des mesures de mobilisation des ressources fiscales, la lettre de cadrage a fait état de « l’adoption d’un plan d’élimination progressive de la subvention des produits pétroliers et d’un mécanisme de mitigation sociale ».

Des mesures annoncées

La lettre de cadrage a annoncé le « renforcement du couloir sécuritaire pour le transport des marchandises en provenance de la douane de Port-au-Prince ;des consultations auprès des acteurs de la Société civile sur le premier Code fiscal haïtien (CFH) intégrant le Code Général des Impôts (CGI) et le Livre des Procédures Fiscales (LPF) dont la mise en œuvre est prévue à

Partir de l’exercice fiscal 2024-2025.

Sur le plan fiscal, peut-on lire dans cette lettre de cadrage, il est prévu une extension du Revenue Management System (RMS) au niveau des bureaux de la DGI ; la poursuite de la mise en œuvre progressive du Plan de rationalisation des dépenses fiscales (PRDF); le renforcement des dispositifs informatiques des régies financières (AGD-DGI-Trésor) pour accroitre l’échange d’informations; le renforcement des structures pour une meilleure perception des droits de  douane; le suivi de l’accord d’échanges d’information entre les autorités douanières de la République dominicaine et d’Haïti pour lutter contre la contrebande ; l’accélération du processus de partage d’informations entre la DGI et l’Office national d’identification (ONI) pour l’identification des contribuables; le renforcement du mécanisme de suivi pour le versement des créances des organismes autonomes au Trésor public.

Gouvernance et passation de marchés publics

La lettre de cadrage a fait état du renforcement de la gouvernance et du climat sécuritaire dans le pays, du renforcement des procédures d’octroi des Marchés publics dans le cadre de l’attribution des contrats de marchés publics; de la mise en œuvre du décret établissant l’obligation de présenter les informations permettant d’identifier les bénéficiaires effectifs des Marchés publics et des concessions, et de l’arrêté fixant les seuils de passation des marchés publics en dessous des seuils d’intervention de la Commission nationale des marchés publics (CNMP).

Reddition de comptes : l’audit covid-19 attendu

La lettre de cadrage a évoqué comme objectif la « finalisation et publication par la Cour supérieure des comptes et du Contentieux administratif (CSCCA) du Rapport de l’audit des dépenses Covid-19; le renforcement de la capacité opérationnelle des forces de l’ordre pour lutter contre le banditisme et la prolifération des gangs armés; le renforcement de la capacité de l’Administration générale des douanes (AGD) à travers l’acquisition d’équipements modernes, de manière à freiner l’importation illégale des armes à feu et de munitions sur le territoire.

Maitrise de la masse salariale : 1 nomination pour 2 cessations

La lettre de cadrage fait également état de la maitrise de la masse salariale à travers, d’une part le programme de départ à la retraite volontaire qui s’inscrit dans un contexte de rationalisation et de rajeunissement de la fonction publique et d’autre part, des recrutements limités (1 nomination pour 2 cessation), un autre objectif, ainsi que le renforcement de l’application du visa préalable en vue de la prévention des risques budgétaires ainsi que l’amélioration de la qualité de la comptabilité budgétaire.

L’exercice fiscal 2021-2022 a débuté sur fond de crises diverses affectant d’emblée le déroulement des activités économiques. En plus des contrecoups de la fin de l’exercice précédent, le contexte d’incertitude qui règne dans le pays depuis les trois dernières années s’est aggravé, notamment avec l’accentuation, au tout début de l’année budgétaire 2022, des difficultés d’approvisionnement du marché intérieur en carburants, la recrudescence et l’intensification de la violence liée aux gangs, la remontée des cas d’enlèvements et de séquestration contre rançon, affaiblissant ainsi les cadres de politique économique alors que les conditions sociales et économiques se sont détériorées pour atteindre un niveau inquiétant. La combinaison de ces événements malheureux a provoqué ainsi, au cours des deux premiers mois de l’année budgétaire, une hausse spectaculaire des prix des produits de première nécessité et d’autres produits de consommation courante, le ralentissement des activités économiques notamment au niveau du secteur tertiaire et de la sous- traitance, des difficultés d’accès aux bureaux de la Douane de Port-au-Prince, et l’impossibilité pour la Direction générale des impôts (DGI) d’effectuer les contrôles de routine, selon cette lettre de cadrage.

Des chocs externes ont aussi affecté le déroulement de l’exercice fiscal 2021-2022:

la flambée des prix des produits de base sur le marché international et les récents conflits en Europe de l’Est opposant la Russie à l’Ukraine en sont les principaux.

Inflation et baisse des transferts

En effet, au mois de janvier 2022, l’inflation, en Haïti, a atteint 24% en glissement annuel, avec une poussée au niveau de la variation des prix des produits importés qui est de 33% contre 19.1% pour celle des produits locaux. Les flux de transferts privés sans contrepartie reçus de la diaspora haitienne ont augmenté à un rythme nettement plus faible, en glissement annuel, soit une hausse de 3% sur les quatre premiers mois de l’exercice fiscal 2021-2022 contre 36% pour la période précédente, a indiqué cette lettre de cadrage. Depuis le 24 février dernier, date du déclenchement de la guerre entre l’Ukraine et la Russie, les marchés des matières premières du monde entier ont été secoués sachant que ces deux économies sont de grands exportateurs de produits tels que le blé et les céréales, le pétrole, et le gaz naturel. Cette situation, qualifiée d’intenable par de nombreux Etats fragiles, est susceptible de provoquer une contraction des transferts de la diaspora d’ici la fin de l’exercice fiscal et aussi d’éroder davantage le pouvoir d’achat de la population dont plus d’un tiers se trouve en situation d’insécurité alimentaire, peut-on lire dans cette lettre de cadrage qui est assez optimiste.

Roberson Alphonse


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