Insécurité : l’Université Quisqueya entend faire bouger les lignes

Written by on July 4, 2023

Le Nouvelliste publié le 03 juillet 2023 –  Le recteur de l’Université Quisqueya a organisé, les 28 et 29 juin derniers, une conférence internationale sur l’insécurité en Haïti via la plateforme Zoom. Selon Jacky Lumarque, elle vise à comprendre le comportement de la communauté internationale qui « tourne en rond » face à la crise haïtienne. Au cours de cet événement, l’institution a réuni un total de 52 intervenants autour de 11 panels de discussion.

Pendant deux journées, les panélistes ont débattu sur les principales causes de l’insécurité, son origine, son impact sur les droits humains, l’organisation des élections, entre autres. Le débat est local et est porté également à l’échelle internationale. « Nous avons réalisé un consortium avec trois entités internationales : InterAmerican Dialogue, l’Université d’Ottawa et Colegio de México, un pays au cœur de la criminalité transnationale. Nous avons réalisé un autre consortium avec les 10 universités régionales. Nous apporterons le débat au cœur des départements pour prendre en compte la dimension locale », a expliqué le recteur de l’Université Quisqueya durant sa participation à l’émission Panel Magik  vendredi 30 juin précisant que « L’insécurité n’a pas la même configuration à Port-au-Prince que dans les provinces. Les réponses de l’État ne sont pas les mêmes. »

À travers cette conférence internationale sur l’insécurité, l’Université Quisqueya entend mettre en place une mobilisation nationale avec pour intention, d’une part, d’influencer l’action publique dans le sens d’une plus grande réactivité face au phénomène des gangs et d’autre part contraindre la communauté internationale à se positionner sur la crise haïtienne.

« Après avoir rencontré plusieurs experts en Haïti, j’ai compris que si le gouvernement actuel avait montré beaucoup plus de détermination, de mobilisation de ressources nationales au profit de la Police nationale d’Haïti et des Forces armées d’Haïti, il y aurait une motivation supérieure de ces forces pour combattre les gangs. Nous ne serions pas dans la situation inverse où les policiers sont défiés par les gangs. Donc, nous voulons exercer une pression sociétale puissante sur les appareils étatiques pour les forcer à concentrer toute leur énergie pour résoudre le problème de l’insécurité », a dit M. Lumarque.

Le problème de l’insécurité est « politique »

M. Lumarque reste persuadé que le problème de l’insécurité est politique. « La forme que prend l’insécurité aujourd’hui n’est pas traditionnelle. À Chicago, l’insécurité est maintenue par les marginaux, des exclus. Ici, les gangs sont des produits du politique. Ce sont eux qui ont créé les gangs pour gérer la relation au pouvoir. Le secteur privé s’est mêlé de la partie pour résister, négocier avec les gangs, les acteurs financiers pour gérer les compétiteurs. Il y a une instrumentalisation réciproque du secteur politique, du privé et des gangs. La configuration m’amène à dire que l’insécurité n’est pas un problème technique mais politique, qu’il faut aborder dans cette dimension », a-t-il dit.

« Nous sommes arrivés à une situation où les experts ont admis que nos forces de sécurité actuelles ne sont pas en condition de traiter cette question. Nous avons besoin du support international. Sous quelle forme ? », s’est-il demandé. M. Lumarque appelle le panel de l’impuissance, celui composé du BINUH, de la PNH, des FAD’H. « Toutes ces entités montrent leur impuissance par rapport à ce phénomène »

En parallèle, « l’international tourne en rond ». C’est pour cela que la conférence ambitionne d’influencer la communauté internationale afin qu’elle fasse un choix sur Haïti. « Tous ces pays, le Canada, les États-Unis, le Mexique, entre autres, ne peuvent ne pas se dire incapables d’apporter une réponse coordonnée à un simple petit pays de la Caraïbe », s’est plaint le recteur.

Dans le débat les avis divergent autour de l’organisation des élections. « Il y a des points de vue selon lesquels le climat n’est pas propice à la réalisation d’élections. Selon les porteurs, le rétablissement de la sécurité est primordial avant le déroulement du scrutin. D’autres, par contre, croient que les gangs envisagent uniquement de faire de l’argent sans idéologie. Par conséquent, ils pensent que la réalisation des élections pourrait favoriser une réduction de l’insécurité car les bandits y verront un véritable marché. »

https://ssl.gstatic.com/ui/v1/icons/mail/images/cleardot.gifÀ la suite de ces deux journées de réflexion, l’Université Quisqueya envisage de rester mobilisé, faire des recommandations pour mettre en branle l’action publique haïtienne, créer un mouvement de coopération solidaire de l’international avec Haïti. Dans un deuxième temps, l’institution annonce que les Universités publiques régionales reprendront les thématiques pour redoubler les efforts en faveur de la sécurité en Haïti.

Par Germina Pierre Louis
03 juillet 2023 | Lecture : 3 min

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